gobelet

La ligne 11 du métro héberge une paire de types entre deux verres, pas assez saouls pour être drôles, mais plus assez sobres pour maîtriser leur vessies surannées. L'odeur de pisse aidant les entretiens intimes, Jean-Marie parle à Casquette rouge de son épisode traumatique à son retour de Guinée avec son fils. "quinze chez moi, lumière allumée, porte allumée!". casquette rouge ne dit rien mais a l'air d'un qui a les fils qui se touchent, alors ça n'est sans doute pas bien grave. Et puis ça ne dérange pas J-M de parler à un fou, puisqu'il continue sa litanie, en exprimant toute la violence de huit jours de séquestration par de grands gestes de ses mains noires, même qu'il touche Casquette rouge qui s'en moque toujours, jusqu'à la phrase "tiens toi bien.. ils m'ont sodomisé". Parler de sodomie dans un métro bondé à 14 heures, ça ne se fait pas, mais ça Jean Marie l'ignorait. Quand casquette rouge lui annonce que son problème à lui, c'est d'arriver à l'heure à Luxembourg pour déposer son manuscrit chez un éditeur, je vois déjà J-M se jeter sur le sac noir de son voisin pour voler les précieuses pages, mais il n'en fait rien. Il dit juste qu'il rentre chez lui, porte d'Orléans, dans sa petite chambre trop petite pour mettre une télé "c'est dommage, dit-il, avant, tout était bien". Casquette rouge se taille en souhaitant triomphalement une bonne journée au pénétré , et moi j'ai juste envie de lui offrir un bonnet, parce qu'arborer une casquette de couleur rouge en plein Paris, c'est honteux.

Mardi 2 novembre 2010 à 19:27

Ta bouche mes mollets, mes joues tes poignets. On a trouvé l’hymne de la soirée, ou du moins un truc aussi con que nous à gueuler jusque dans la pizzeria pas loin de Jussieu. On est entrées là-dedans bille en tête, sans même trop savoir ce qu’on foutait là, et le gérant s’improvisant grand seigneur nous fait une grande pizza au prix de la petite.  Nos porte monnaies lui en sont si reconnaissants que le lendemain on trouvera même de quoi se payer le traditionnel sandwich dominical au Pomme de pain de Montparnasse.
Douze mois et quatre portables perdus plus tard, on est chez Robert, les californiennes crient voilà ! -en français dans le texte- et prennent leur tequila paf sans sel ni citron. On ne sait pas encore que quelques heures plus tard, on enverra un jeune majeur en dégrisement, alors on profite de la gratuité du william peel et des Lucky strike convertibles. Robert s’enfuit en laissant son 20 mètres carrés à une dizaine de gonzesses survoltées, et c’est sur une porte qui ne s’ouvre pas que le voisin qui travaille le samedi se casse le nez à trois heures du matin.  Quatre stations de métro plus loin, on traîne nico à la terrasse d’un bar ouvert 24/24, mais pas un seul pigeon pour nous payer un plat de pâtes. Dans cet état d‘esprit, le serveur qui nous vire sans nous le dire, on est à deux doigts de lui balancer nos sacs à la gueule, mais on se contente finalement de l’insulter, parce que voyez-vous, nous sommes de braves gens.

Mardi 12 octobre 2010 à 22:05

L’association espagnole de Reims est un endroit magique, et pas seulement parce que le local est impossible à trouver si on n’est pas rencardé. C’est là où l’assiette de frites est à un euro cinquante, et où le prix du baron défie toute concurrence. Le samedi soir, comme ça ferme à 23 heures, on a le temps de faire une bataille corse, de jouer avec les mots et d’exploser le baby-foot à coups de roulettes, tricheries et mauvaise foi. J’ai toujours aimé jouer au baby-foot, et dans le grenier de mes grands parents j’étais la meilleure, puisque mon adversaire principal était mon cousin de deux ans mon cadet. Seulement, quand j’encaissais dix buts à zéro contre papa, ses anciennes habitudes de soirées estudiantines prenaient le dessus et je devais passer sous le baby. Alors, entre une tournée et une cousue, mes réflexes du grenier sale reviennent, et c’est tout naturellement qu’en marquant un but, je lance un « et tiens! » triomphant à nos deux adversaires médusés.

Mardi 5 octobre 2010 à 20:35

A vingt-cinq dans un quarante mètres carré, l’atmosphère pourrait vite devenir irrespirable, mais les dipsomanes ont de la jugeotte, et ce sont les changements réguliers de pièce qui permettent au rassemblement de se dérouler cahin-caha, au gré des lampes cassées et autres futilités. Sur le balcon, les douze pompes à nicotine jouent des coudes pour ne serait-ce que sortir un briquet -qui n’est d’ailleurs sûrement pas le leur- sans même s’apercevoir qu’ils ont déjà fumé l’équivalent de trois sèches simplement en inspirant. Ça fait vingt minutes que les toilettes sont occupées par une caricature de couple, et depuis à peu près le même temps, la contre soirée de la cuisine disserte sur s’ils le font ou non, et si une capote usagée va rejoindre la bière à moitié pleine et les capsules qui décorent plus ou moins artistiquement la pièce bleue.

Et quand à quelques secondes d’intervalle, b. et moi déballons exactement le même discours à une marion bien trop sobre, la fine équipe, je la vois.

Jeudi 30 septembre 2010 à 10:30

C’était de la musique dans ma tête et dans mon corps qui tout d’un coup s’est tue. L’adrénaline qui retombe d’un coup, le vigile probablement haïtien qui continue de me regarder d’un sale œil pour que je repasse du bon côté des barrières, parce que bon, si tout le monde commence à faire comme ça,  rendez vous compte un peu les proportions que ça peut prendre. J’imagine qu’il visualisait un mouvement de foule qui finirait par du sang, des larmes, et des globes oculaires écrasés sur la pelouse. Le genre de spectacle qui fait mauvais genre en Picardie. C’est là que je me suis retournée pour enjamber la barrière. Assise comme une amazone en carton pâte, je me contorsionnais pour anticiper le demi tour en équilibre sur cette barre froide, le tout sans laisser tomber la bouteille dans mes seins et le pèse personne sous mon bras. Quand je me suis vautrée, la sécurité incarnée par ce grand mec m’a regardée en souriant. Je pense quand même qu’il regrettait que je ne me sois pas cassé deux dents. Alors j’ai couru.

Lundi 20 septembre 2010 à 20:32

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